jeudi 16 août 2007

Le Mas des Bruges

Ce qui nous fait tant rêver maintenant, dans notre monde tellement aseptisé, ce pittoresque à la recherche duquel nous sommes tant accrochés dans chacune de nos escapades en Ardèche ou ailleurs, devait être un présent bien rude à vivre pour nos aïeux. Nous nous extasions avec émotion devant une vieille masure mais nous oublions parfois tout ce qui allait avec et qui témoignait de la pauvreté et du manque d'hygiène au quotidien.

Voici ce qu'écrit Jean Volane, à propos de quelque hameau pittoresque qu'il ferait si bon découvrir au détour d'une colline, aujourd'hui :

Le repos des âmes

Les cloches de la vieille tour geignent, lançant leurs glas funèbres à tous les échos du Vivarais. On enterre aujourd'hui la Marion du père Boritte - un vieux fermier du Mas des Brugres - joli petit hameau collé au flanc d'une montagne couverte de châtaigniers et de bruyère rouge.

Elle fait plaisir à voir cette poignée de maisons acagnardées au soleil comme de vieilles femmes. Oh ! Mais de loin seulement .

Si vous gravissez les ruelles montantes et pavées du Mas des Bruges, vous êtes obligé de vous serrer les ailes du nez, tant les odeurs que vous percevez sont désagréables. L'oeil n'est reposé par rien de gentil et de propre : des intérieurs enfumés, avec, pour plancher de la boue tassée par des générations de paysans, de la charcuterie qui pend aux grosses poutres noires, quelques images d'Epinal, deux ou trois chromos de saints au-dessus d'un bénitier surmontant le chevet du lit; des mioches crasseux et morveux qui jouaient demi-nus au seuil des portes.

Volane, Jean. "En Vivarais" : Tome I - impressions, descriptions, notes historiques, ed.: Paris ; Nancy : Berger-Levrault, 1897

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